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Mikhaïl Boulgakov – La garde blanche

Posted on 21 avril 202015 février 2021 by Au Coeur des Silences

La garde blanche est le premier roman de Mikhaïl Boulgakov, écrivain russe davantage connu pour son monumental roman Le Maître et Marguerite. Ce roman est intéressant pour trois raisons : pour son caractère autobiographique puisque l’auteur s’est inspiré de ce qu’il a vécu durant l’hiver 1918-1919 ; pour le témoignage historique que Boulgakov nous offre ; enfin pour l’histoire de la publication de ce roman et de son adaptation théâtrale, véritable révélation de la lutte qu’a dû mener Boulgakov toute sa vie face à la censure soviétique.

Mikhaïl Boulgakov est né en 1891 à Kiev qui appartenait alors à l’empire russe avant de devenir la capitale et la plus grande ville d’Ukraine en 1918, et c’est bien dans cette ville, qui n’est pourtant jamais nommée, que l’action du roman se déroule. L’écrivain russe s’est très largement inspiré des événements de cet hiver 1918-1919 qu’il a vécu pour écrire son roman. L’appartement dans lequel vivent les personnages est en tous points celui dans lequel a vécu Boulgakov à Kiev, avec sa femme et ses frères et sœurs, au 13 descente Saint André ; les membres de la famille Tourbine, les deux frères et la sœur, ressemblent à certains membres de la famille de Boulgakov : ses deux frères Ivan et Nikolaï Boulgakov se sont engagés dans l’Armée des volontaires qui deviendra l’Armée blanche, Mikhaïl lui-même a intégré cette Armée blanche en tant que médecin, l’aînée des Tourbine est médecin et attrape le typhus comme Mikhaïl. Enfin les événements qu’il décrit ont vraiment eu lieu et Mikhaïl Boulgakov y a réellement assisté ou participé. C’est donc pour toutes ces raisons que l’on peut qualifier La garde blanche de roman autobiographique, genre littéraire que l’on retrouve dans la quasi totalité de l’oeuvre de Mikhaïl Boulgakov : on peut retrouver son épisode de morphinomanie dans sa nouvelle Morphine qui raconte l’enfer d’un médecin de campagne souffrant d’addiction à la morphine ; son histoire d’amour avec Elena Sergueïevna qui deviendra sa troisième épouse, et sa difficile relation avec le pouvoir stalinien sont largement évoquées dans Le Maître et Marguerite.

Au-delà du roman autobiographique, La garde blanche est aussi et presque avant tout un témoignage historique des événements de l’hiver 1918-1919 qui se sont déroulés à Kiev. Suite à la Révolution d’octobre ou autrement appelée Révolution bolchevique qui a eut lieu en octobre 1917, les bolcheviques se sont installés à Kiev d’où ils seront chassés deux mois plus tard. En décembre 1917, La République populaire ukrainienne est instaurée et s’accompagne d’une résurgence de l’hetmanat cosaque disparu depuis la fin du 18ème siècle, et qui se révélera n’être finalement qu’une marionnette de l’empire allemand. Durant l’hiver 1918-1919, vont se jouer à Kiev des affrontements sanglants entre l’hetmanat, les nationalistes représentés par Petlioura, l’Armée blanche (fortement monarchiste) représentés par le général Dénikine. L’Armée blanche a été créée afin de lutter contre l’invasion bolchevique. Nous sommes donc au cœur de trois conflits simultanés : la Première Guerre Mondiale, la guerre civile russe et l’instauration de la République ukrainienne. Le lecteur pourrait ici accuser Mikhaïl Boulgakov d’un certain sentimentalisme nostalgique puisque l’écrivain dénonce très clairement la disparition de l’empire russe et pleure la destitution et la mort de Nicolas II, dernier empereur de Russie, sans compter qu’il est à cette époque monarchiste et libéral, mais c’est bien plus un sentiment de stupéfaction ainsi qu’un mouvement de résistance qui enveloppent le roman, stupéfaction et résistance nimbés de fantastique dans l’épisode fiévreux d’Alexis Tourbine, stupéfaction et résistance face au bolchevisme, avec cette conscience déjà très présente des ravages culturels et de la lutte intellectuelle à venir.

Cette résistance face à la censure soviétique, Mikhaïl Boulgakov en fera preuve toute sa vie et c’est peut-être ce qui sera le moteur de son oeuvre littéraire. La garde blanche ne sera publiée dans son intégralité qu’en 1973, soit plus de trente ans après la mort de son auteur en 1940 à Moscou. Les deux premières parties ont été publiées dans une revue littéraire en 1926, mais la troisième partie ne pourra l’être car la revue sera interdite sur décision du gouvernement soviétique. Mikhaïl Boulgakov en écrit alors une version théâtrale, Les jours des Tourbine, qui sera également interdite jusqu’à l’intervention de Staline pour être jouée. Toute sont oeuvre sera régulièrement interdite, censurée – la première publication de La garde blanche en 1966 l’a été – et Mikhaïl Boulgakov aura passé sa vie à résister contre la censure soviétique avant de mourir à 48 ans.

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